Je n’ai aucune prétention de me prononcer sur le fond du dossier. Ce volet revient, naturellement à l’auteur de l’article qui, seul saura fournir des éléments probants pour étayer sa révélation.
Mon choix d’écrire un article sur ce sujet tient de ce que Carlos Kétohou est un citoyen togolais, jouissant des droits et devoirs, clairement établis par les lois de la République.
Cela dit, passons aux faits.
Le journal Indépendant Express a sorti, la semaine dernière, un article faisant état de ce que, deux femmes ministres seraient interpellées au sortir d’une réception par des gardiens d’une institution financière pour vol de cuillères dorées.
A sa manière, il a fait son développement sans donner des précisions qui conforteraient tout projet d’analyse objective et professionnelle de l’article.
Juste au lendemain de la parution de l’article, les services de renseignements et d’investigations de la gendarmerie nationale lui ont adressé une convocation aux fins de comparaître le lendemain.
Curieusement, le même jour, et de nuit, le patron des services anti gangs,déploie tout un contingent d’hommes en armes aux abords du domicile du journaliste, ainsi que dans les environs de son bureau.
Il sera ensuite cueilli, nuitamment, proprement comme un malpropre, avec pour destination le service anti gang où il passera bien sûr, le reste de la nuit.
Le lendemain, alors que l’ensemble des patrons des organisations de presse se sont mobilisés pour aller lui rendre visite et voir de quoi il retournait, ils n’ont pu accéder, même à l’entrée du service anti-gang.
Dans la foulée, l’on apprendra que, finalement, monsieur Ketohou a été transféré aux services de renseignements où il passera au moins trois bonnes nuits.
Puis, c’est la Haute Autorité de l’audiovisuel et de la Communication (HAAC) qui entre en jeu avec une note invitant ce dernier à comparaître par devant ses services ce lundi matin.
Quelques heures plus tard, une décision de l’institution nous renseigne que non seulement le journal est interdit de parution, mais une saisine du président du tribunal de première instance de Lomé a été faite dans le but évident du retrait pur et simple du récépissé octroyé au patron du journal Indépendant Express.
Tout ceci appelle à une analyse approfondie des faits.
D’abord, il est clairement établi que la corporation des journalistes comme celle des avocats, des magistrats, des huissiers, des militaires etc., est régie par une réglementation dont le pouvoir tutélaire, en l’espèce, est conférée à la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC).
Comment donc comprendre l’intrusion des services anti gangs dans la gestion d’un tel dossier?
Qu’est-ce qui fonde le service de renseignements à envoyer une convocation à un journaliste pour un présumé délit de presse ?
Mieux, où était donc la HAAC lorsque tout cela se passait dans ce pays et à son nez?
Dans l’ordre normal des choses, le bon sens impose que cette institution, avant toute convocation du journaliste, sorte un communiqué pour non seulement dénoncer cette intrusion des hommes en armes dans la gestion d’un tel dossier, mais surtout aussi, la condamner avec la dernière rigueur.
Elle se devait de le faire d’autant plus son rôle n’est pas que de réguler de façon complaisante la presse, mais surtout de la protéger contre toute attaque indécente et inopportune, d’où qu’elle vienne.
Après quoi, l’institution pourrait se donner le droit de convoquer le journaliste et d’engager la procédure qu’il lui plaira, au vu du dossier, d’initier.
Pour avoir manqué de procéder de la sorte, l’on a le désagréable sentiment que le journaliste est plutôt victime d’un acharnement et son dossier est géré avec une telle transe que l’on se demande d’où viennent les ordres au point où des professionnels aussi bien de la gendarmerie que de la HAAC, omettent de se soumettre aux exigences de la loi.
Cette question est d’autant plus pertinente que l’amateurisme, le jonglage ou la force brute ne peuvent plus être tolérés dans un pays qui s’essaye à l’exercice démocratique depuis plus de trente ans.
Nous devons pouvoir faire du chemin en à la matière et manifester un minimum d’équilibre, de décence et de bon sens, quelle que soit l’ampleur du problème auquel nos institutions doivent faire face.
Ces genres d’errements n’arrangent ni le dirigeant, ni les citoyens eux-mêmes, ils écornent plutôt l’image du pays à tous points de vue. Alors à quoi servent-ils au bout du compte? La question reste posée.